Un procès n'est jamais une partie de plaisir, quoique... avec Sherlock et Watson, tout peut arriver et c'est exactement ce qui arriva ce jour-là; tout.
Nos deux brillants détectives étaient arrivés largement en avance au palais de justice, le temps d'enfiler leurs toges, histoire de s'imprégner des lieux et de s'assurer que le dossier était bien ficelé pour remporter cette victoire d'une importance capitale, autant pour leur orgueil personnel que pour sortir Hervé Cassoulet de cette impasse. Watson croulait sous les dossiers, il avait en main tous les éléments nécessaires à sa plaidoirie et quelques papillons dans l'estomac. Le jour était venu, pour lui, d'exercer ses talents d'avocat, aidé par le soutien indéfectible de son ami Sherlock, et il était confiant de réussir. Car, oui, avouons-le, le scribe des textes anciens était dans l'eau bouillante, simplement parce qu'il avait, si on peut dire d'une manière imagée, trempé son biscuit dans la soupe won-ton de Ball Debeling. En fait, s'il fréquentait d'une façon assidue le restaurant chinois, ce n'était pas uniquement pour les beaux yeux de Ball, quoique Ball avait de très beaux yeux en amandes.
La salle d'audience était remplie à pleine capacité car ce meurtre avait suscité énormément de spéculations. Certaines mauvaises langues laissaient sous-entendre que le restaurant n'était qu'une couverture, une façade derrière laquelle se déroulaient des activités pas très catholiques. On disait, dans les salons, qu'un réseau clandestin de supra intellectuels fonctionnant au niveau du mental, secte méconnue mais active, profitait de la naïveté du propriétaire pour glisser en douce, dans les fortune-cookies, des messages subliminaux dans le but de manipuler dans tous les sens les esprits du bon peuple. Les gens étaient très curieux de connaître le dénouement de cette macabre affaire et d'en connaître tous les dessous.
On désigna le juge I.Stanislas Dufaux, célèbre pour sa droiture, son dégoût de la fausseté et surtout pour sa réputation d'incorruptible. D'ailleurs il était le digne fils de feu Yvon Brulé Dufaux, pompier de son métier, un homme d'honneur s'il en est un, qui était mort honorablement dans une explosion en faisant griller des hot-dogs sur le barbecue familial par un beau dimanche après-midi de juillet, sa bobonne de gaz ayant fui malencontreusement.
À l'arrivée du juge dans la salle d'audience, le greffier hurla comme un perdu; LEVEZ-VOUS. Saisi de stupeur, Sherlock éteignit sa pipe et Watson se donna un dernier coup de peigne, puis referma discrètement son petit miroir Gucci, cadeau de sa chère Claudia. Le temps était venu de performer devant la galerie. Il jeta un regard de chien battu autour de la salle et ajusta sa bavette en frou-frou espérant ne pas avoir l'air trop fou, affublé de ce déguisement. Soucieux de suivre le protocole à la lettre, il avait enfilé docilement l'habit traditionnel des gens de la cour malgré le fait qu'il se sentait ridicule avec sa longue perruque blanche à boudins. Il prit son courage à deux mains et son dossier de l'autre puis s'adressa au juge en chuchotant.
Watson: Votre grandeur, me permettez-vous de m'approcher de la barre?
Le juge: Bien sûr, approchez!
Watson: Vous ne trouvez pas que ça sent mauvais, cette histoire?
Le juge: J'avoue qu'il plane ici une odeur nauséabonde, mais je croyais que ça venait de vous.
Watson: Votre éminente pitance, je voudrais tout de même vous faire remarquer que j'ai pris mon bain dès ce matin, m'aspergeant de Brute fragrance et je prends ici à témoin mon collègue Sherlock qui peut vous confirmer la chose.
Le juge: Maître Watson, la perruque que vous portez date du temps de l'inquisition, si je ne me trompe?
Watson: Euh, non votre sainte instance, je l'ai louée chez Norman Lester Wysiwyg Design.
Le juge: Wysiwyg? Est-ce un dialecte amérindien, dites-moi?
Watson: Non, votre grandiloquence, il s'agit d'un anagramme fortement utilisé par les webmestres sur le web, emprunté par Norman pour sa compagnie de moumoutes. Cela signifie "What You See Is What You Get". Autrement dit, ce que vous voyez c'est ce que vous avez. Donc j'ai eu ce que j'ai vu et voyez vous-même le résultat.
Le juge: Ouin... mais enfin, il aurait pu traiter ses perruques à l'ozone pour éliminer les odeurs indésirables.
Watson: Désirant plaire à la cour, je vais de ce pas demander à mon collègue Sherlock de me poudrer la perruque avec sa petite poudre blanche qu'il traîne toujours dans son attaché-case.
Sur ce, Watson s'approcha de Sherlock qui sortit de sa serviette une boite de poudre baby's own et lui aspergea abondamment la tignasse devant la foule ahurie.
Watson: Assez, Sherlock! Vous êtes en train de m'embrouiller la vue et l'esprit.
Le juge: Trêve de futilités superficielles et frivoles, messieurs, nous ne sommes pas ici pour faire une parade de mode. Si on passait maintenant aux faits.
Watson: Compris votre pétante pestilence.
Le juge: En passant, je vous prierais de m'appeler Votre Honneur, selon la coutume.
Watson: Je ne comprends pas, pourquoi m'appelez-vous votre honneur? Et pourquoi voulez-vous que je vous appelle? Je ne suis pas là pour me faire un cercle d'amis. Quelle espèce de juge êtes-vous donc, essayez-vous de m'acheter? Je ne mange pas de ce pain-là, moi, monsieur.
Le juge: Non, je vous dis que VOUS pouvez m'appeler Votre Honneur.
Watson: Vous voulez dire que vous voulez que je vous appelle mon honneur mais dans quel but? Voulez-vous dire que je dois appeler mon honneur pour vous à la barre? Je ne comprends plus rien à votre charabia.
Le juge comprit que sa patience serait mise à rude épreuve avec cet original. À bout d'arguments, il se tourna vers le greffier pour établir une dernière formalité avant de débouter le procès proprement dit.
(Note de l'éditeur: Y'a pas une erreur là? Vous avez écrit débouter le procès au lieu de débuter.)
(Note de l'auteur: Vous saurez mon cher que débouter est un terme juridique.)
(Note de l'éditeur: Je veux bien, mais si le juge commence déjà à débouter dès le début, il n'y aura pas de procès.)
(Note de l'auteur: Bon, ça va, disons débuter alors.)
(Note de l'éditeur: Je sens que je vais devoir intervenir souvent dans ce chapitre.)
Le juge: Vous êtes Justin Trouduc, vous, le greffier?
Justin Trouduc: C'est exact, Votre Honneur.
Watson: Juste un trou du'c...?
Le juge: Alors, cessez de prendre des notes, cette partie du procès ne doit pas figurer aux minutes. Bref, le greffe ne doit pas être submergé de ces apartés inutiles, alors, allez-y en vous servant de votre jugeote, si vous en avez une.
Watson: Bon, avez-vous fini, là, de vous organiser des party avec le Trouduc. Je ne sais s'il a besoin d'une greffe capillaire ou mammaire, mais je ne vois aucun chirurgien dans la salle.
Le juge: Vous, maître Watson, fermez-là! Et, vous, le Trouduc, redescendez de votre piédestal. Le fait que votre père fût premier ministre ne signifie pas nécessairement que vous soyez une sommité. Puisque vous avez été désigné comme greffier, alors, assoyez-vous dans votre trône et fermez-là. Encore une preuve que l'intelligence saute souvent une génération.
Justin Trouduc: 10-4!
Le juge: Maintenant, maître Watson, avez-vous un témoin attraire?
Watson: Euh... à traire... euh... il y a bien la femme de la victime qui attend pour témoigner, mais est-ce qu'elle serait prête à se faire traire? euh... j'en sais foutrement rien.
Le juge: Oh pardonnez-moi, je voulais dire à attraire, qui signifie traîner devant la justice, enfin, débutons maintenant, je vous prie.
Watson: Votre majesté, je voudrais maintenant interroger mon premier témoin, il s'agit du médecin-légiste qui a examiné la victime après son décès. J'appelle à la barre, le docteur Uretère Jambon.
Le premier témoin s'approcha. De bonne corpulence, il prit place, tant bien que mal, dans la chaise des témoins où il se trouva un peu à l'étroit.
Le juge: Mettez votre main droite sur la bible et dites je le jure.
Uretère Jambon: Je ne peux pas, Votre Honneur, j'ai perdu mon bras droit dans un accident de chasse.
Le juge: Pardon, je n'avais pas remarqué cette absence. J'ai un mal de tête lancinant et pénible qui me déconcentre. C'est comme si j'avais une tuque de douleur. Alors poursuivons et prenez la gauche.
Uretère Jambon: De toute façon, j'ai dû passer l'arme à gauche depuis ce drame, si je peux m'exprimer ainsi. Voulez-vous des Anacines?
Le juge: Non non, poursuivez maître Watson.
Watson: Tout d'abord, docteur Jambon, veuillez dire à la cour quel est le jour de votre anniversaire ?
Uretère Jambon: Le 2 septembre.
Watson: Quelle année?
Uretère Jambon: Chaque année.
Watson: Docteur, combien d'autopsies avez-vous effectuées sur des morts ?
Uretère Jambon: Toutes mes autopsies ont été effectuées sur des morts.
Watson: Et dans quelles circonstances avez-vous décidé de devenir autopsien? Est-ce comme cela qu'on vous appelle?
Uretère Jambon: Pas nécessairement, plusieurs m'appellent le gros Jambon.
L'audience éclata de rire et Watson attendit le silence absolu pour poursuivre son interrogatoire.
Watson: Docteur, dites à la Cour ce que vous avez remarqué de spécial lors de l'autopsie.
Uretère Jambon: J'ai remarqué une anomalie au niveau de la glande pinéale, c'est-à-dire celle qui se situe juste au-dessous de la glande peux-tu t'taire, siège du cerveau reptilien.
Watson: Vous voulez dire la glande pituitaire, je suppose?
Uretère Jambon: C'est bien ce que j'ai dit, la glande peux-tu t'taire.
Watson: Ce détail ne me semble pas pertinent étant donné la rigidité cadavérique de la victime car, si je ne me trompe, pourrions-nous dire cher Jambon, que le moribond était d'une morbidité avancée lorsque vous décidâtes de procéder à l'autopsie?
L'avocat de la couronne: Objection votre honneur, il essaie d'influencer le témoin en mettant ses verbes au passé simple.
Le juge: Maître Watson, veuillez formuler votre question différemment.
Watson: Mais de quelle façon pourrais-je donc le faire? Moi qui m'exprime d'un français impeccable.
Le juge: À vous d'en juger.
Watson: Je vous ferai remarquer subtilement que c'est vous le juge.
Le juge: N'essayez pas de faire le drôle ou je fais évacuer la cour.
Watson: Évacuez mon ami! Évacuez, je m'en contre-torche.
L'avocat de la couronne: Objection! On doit dire je fais évacuer la salle et non je fais évacuer la cour.
Watson: Votre grande flatulence, je n'ai rien contre les objections mais vous trouvez pas que ça commence à faire, là, les objections. Y aurait-il un moyen de lui fermer la trappe juste deux minutes pour que je finisse mon interrogatoire car, à force de changer les questions, je ne m'y retrouve plus. Après tout, c'est à moi qu'appartient le fardeau de la preuve et je dois vous avouer bien humblement que ce fardeau m'a donné des hémorroïdes une bonne partie de la nuit.
Le juge: Préparation H!
Watson: Qu'est-ce que c'est que cette affaire de préparation H? Encore une formule à remplir? Vous ne trouvez pas qu'il y a assez de paperasse ici?
L'avocat de la couronne: Je ne vois pas le rapport avec notre affaire, Votre Honneur.
Watson: Votre affaire! votre affaire! Vous pouvez vous la mettre où je pense, votre affaire, espèce de tantouse.
À l'aide de son maillet, le juge frappa violemment sur son bureau afin de rétablir un peu de discipline, mais ce geste n'améliora pas son mal de tête lancinant et pénible.
Sherlock se pencha à l'oreille de Watson, inquiet de la tournure des événements.
Sherlock: Voyons! Watson, calmez-vous un peu. Vous disjonctez ou quoi?
Watson: Je ne sais pas ce qui m'a pris, c'est la nervosité, je crois. Cette pédale m'a fait perdre les miennes.
Sherlock: Cessez d'insulter la magistrature sinon vous allez vous retrouver avec un outrage à la cour et vous serez rayé du barreau ou pire encore, emprisonné derrière ceux-ci, si vous voyez ce que je veux dire.
Watson acquiesça puis il prit une grande respiration par le nez, histoire de se calmer, et poursuivit, décidé à reprendre la maîtrise de la situation.
Watson: J'appelle maintenant à la barre la sémillante Ball DeBeling, épouse de la victime, maintenant veuve de la victime.
Madame DeBeling, toute de noir vêtue était une très jolie femme aux longs cheveux noirs et elle avait de superbes yeux en amandes noirs.
(Note de l'éditeur: Des amandes noires ça n'existe pas voyons).
(Note de l'auteur: Ce ne sont pas les amandes qui sont noires, ce sont ses yeux, idiot).
(Note de l'éditeur: Vous ne trouvez pas que ça fait beaucoup de noir pour une description? Vêtue de noir, aux cheveux noirs, aux yeux noirs, c'est répétitif.)
(Note de l'auteur: Il ne faut pas oublier que cette femme est en deuil, le noir convient très bien.)
Note de l'éditeur: Bon, ça va, je fais le compromis mais promettez-moi de ne plus faire le con. Promis?)
Sa démarche de mannequin suscita l'admiration de la foule ainsi que celle du juge mais elle était tout à fait inconsciente de l'effet qu'elle provoquait sur son passage. Simple et gracieuse, elle s'avança timidement et prit place à la barre des témoins.
Le juge: Mettez votre main droite euh.. la main gauche plutôt... euh enfin euh... celle qui vous convient le mieux, sur la bible et dites je suis toute à vous juge... euh dites je le jure.
Ball DeBeling: Je le jule.
Le juge: Pourriez-vous répéter?
Ball DeBeling: Je le jule votle honneul.
(Note de l'éditeur: Ah non! Vous n'allez pas recommencer à changer les r pour des l? Ça devient redondant à la fin.)
(Note de l'auteur: Bon, okay, c'est compris. Je voulais simplement décrire l'ambiance le plus fidèlement possible en respectant les accents régionaux.)
Le juge: Bon, procédons, c'est l'intention qui compte après tout, nous prenons en considération votre accent régional.
Watson: Madame DeBeling, corrigez-moi si je me trompe mais c'est bien vous qui avez découvert, tout à fait par hasard, le corps ensanglanté de votre mari immédiatement après le drame?
Ball DeBeling: Oui, je l'ai trouvé bien mort dans la position du foëtus, près du fourneau.
Watson: Dirions-nous que vous avez été extrêmement surprise de le trouver dans cette position car, pour que vous sussiez qu'il était déjà mort, il eut fallu que vous eussiez déjà été au courant de quelque chose de louche?
Ball DeBeling: Euh... c'était quoi la question?
Watson: Je précise; avant que vous le vîtes ainsi aviez-vous des soupçons que quelqu'un eusse pu en vouloir à sa vie?
Ball DeBeling: Euh... oui...euh...non.
Objection!
C'était encore l'avocat de la couronne qui n'avait que ce mot à la bouche. Cette redondance exaspéra Watson qui explosa.
Watson: Votre Honneur, ce clown m'empêche de faire mon travail, pourriez-vous lui dire de se la fermer une bonne fois pour toute?
Le juge: Nous devons suivre la procédure, maître Watson.
Watson: Bon, où en étais-je? Madame DeBeling, je vois ici, dans le contrat signé de votre main, que c'est vous qui fabriquiez les fortune-cookies pour le restaurant chinois de votre mari, en d'autres mots, la victime, votre ex dont vous êtes la veuve de.
Ball DeBeling: Oui c'est bien cela. Je suis la cuisinière en chef et j'ai la charge de cuisiner les fortunes-cookies ainsi que le moo goo guy pen, le moo goo guy kew et le moo goo guy chicken ball red sauce...
Watson: Bon ça va, on comprend l'idée. L'accusé ici présent vous aurait-il approchée en douce pour obtenir une recette en particulier?
Ball DeBeling: Disons qu'il aimait bien m'assister dans ma tâche quand j'enroulais mes fortune-cookies, tout en jasant de choses et d'autres. Il me complimentait souvent sur mes yeux en amandes.
Watson: Lui avez-vous livré le secret de votre recette, en fin de compte?
Ball DeBeling: Notre restaurant ne fait pas la livraison.
Watson: Dois-je comprendre qu'il a dû essuyer un refus de votre part?
Ball DeBeling: C'est moi qui essuyait le comptoir, lui il ne faisait que regarder.
Watson: Pourrait-on dire qu'il n'agissait qu'en tant que voyeur culinaire?
Ball DeBeling: Oui, et je lui ai dit de parler avec mon mari pour les détails. D'ailleurs, ils s'étaient donné rendez-vous le jour du crime, mais Hervé ne s'est jamais présenté.
Watson: Je remarque que vous appelez l'accusé par son prénom, étiez-vous très intimes ou me trompe-je?
Ball DeBeling: On se voyait à tous les jours depuis un mois. Il tenait à me voir à l'oeuvre quand je me tortillais euh pardon quand je tortillais mes fortune-cookies pour y faire pénétrer les petits messages sur papier. Et il n'arrêtait pas de dire que j'avais de beaux yeux en amandes.
Watson: Oui oui, nous savons tout cela, poursuivez.
Ball DeBeling: Dès que les biscuits étaient prêts, il tenait à vérifier s'ils ne contenaient pas de gras trans. Il en cassait quelques-uns et lisait les petits messages à voix basse avec un air soucieux.
Watson: Mais dites-nous, qui préparait ces petits messages destinés à entrer dans la fabrication des fortune-cookies?
Ball DeBeling: Un ami de mon fils, Swing Lä.
Watson: Votre fils Swing Lä Beling? Celui-là même que vous avez conçu avec Chuck Dê Beling, votre mari ou, si on préfère, la victime dont vous êtes la veuve, c'est à dire le père de Swing?
Ball DeBeling: Oui, c'est bien ça. Mon fils Swing Lä se chargeait d'aller cueillir les messages chez son ami et les apportait au magasin pour que je les enfile dans les biscuits.
Watson: Merci, madame DeBeling. J'en ai fini avec ce témoin. Avocat de la couronne, le témoin est à vous.
L'avocat de la couronne: Madame DeBeling, est-ce que vous étiez...
Watson: Objection Votre Honneur!
L'avocat de la couronne: Pourquoi cette objection? Je n'ai même pas encore posé ma question.
Watson: Ben quoi? J'ai pas le droit de me pratiquer moi aussi?
Le juge: Objection rejetée, poursuivez maître .......
L'avocat de la couronne: Madame Debeling, est-ce que vous étiez très intime avec l'accusé ici présent?
Watson: Objection Votre Honneur!
L'avocat de la couronne: Qu'est-ce qu'il y a encore?
Watson: C'est énervant hein? Vous me comprenez maintenant?
Le juge: Maître Watson, taisez-vous! Madame DeBeling, poursuivez!
Ball DeBeling: Aussi intime que mon mari l'était avec lui.
L'avocat de la couronne: Bon, votre honneur, j'en ai terminé avec ce témoin.
Perdu dans ses pensées, le juge manipula son maillet d'une drôle de façon en regardant madame DeBeling s'éloigner gracieusement.
Watson: Monsieur le juge!
Le juge restait silencieux, lunatique, rêveur.
Watson: Monsieur le juge! Êtes-vous toujours avec nous? J'ai rapporté du lieu du crime, un sac de fortune-cookies et j'aimerais le déposer comme pièce à conviction numéro 69.
Le juge: Veuillez le remettre au Trouduc.
Watson retourne à son bureau et cherche le sac en question à travers la paperasse.
Watson: Qu'est-ce que vous faites Sherlock? Vous avez la bouche pleine, êtes-vous en train de manger le sac de fortune-cookies? Ce sont les pièces à convictions pardi!
Sherlock: Euh... j'avais un p'tit creux et j'en ai mangé une dizaine, c'est tout.
Watson: Mais les petits papiers, où avez-vous mis les petits papiers?
Sherlock: Quels papiers?
Swing Lä Beling dans l'fond du tribunal regardait le déroulement du procès d'un œil perplexe. Etant le fils de la victime, il se doutait que le procès ne serait pas une mince affaire, son père n'ayant aucun ennemi connu. Il se sentait un peu coupable d'avoir introduit Gaétan Tanguay, le gourou de l'Ordre Vert dans le commerce familial. Mais il chassa ces pensées de son esprit, tout ça remontait à une dizaine d'années et il n'avait rien pu faire pour se débarrasser de la secte de supra intellectualistes qui avait des tentacules dans tous les milieux.
Nos deux brillants détectives étaient arrivés largement en avance au palais de justice, le temps d'enfiler leurs toges, histoire de s'imprégner des lieux et de s'assurer que le dossier était bien ficelé pour remporter cette victoire d'une importance capitale, autant pour leur orgueil personnel que pour sortir Hervé Cassoulet de cette impasse. Watson croulait sous les dossiers, il avait en main tous les éléments nécessaires à sa plaidoirie et quelques papillons dans l'estomac. Le jour était venu, pour lui, d'exercer ses talents d'avocat, aidé par le soutien indéfectible de son ami Sherlock, et il était confiant de réussir. Car, oui, avouons-le, le scribe des textes anciens était dans l'eau bouillante, simplement parce qu'il avait, si on peut dire d'une manière imagée, trempé son biscuit dans la soupe won-ton de Ball Debeling. En fait, s'il fréquentait d'une façon assidue le restaurant chinois, ce n'était pas uniquement pour les beaux yeux de Ball, quoique Ball avait de très beaux yeux en amandes.
La salle d'audience était remplie à pleine capacité car ce meurtre avait suscité énormément de spéculations. Certaines mauvaises langues laissaient sous-entendre que le restaurant n'était qu'une couverture, une façade derrière laquelle se déroulaient des activités pas très catholiques. On disait, dans les salons, qu'un réseau clandestin de supra intellectuels fonctionnant au niveau du mental, secte méconnue mais active, profitait de la naïveté du propriétaire pour glisser en douce, dans les fortune-cookies, des messages subliminaux dans le but de manipuler dans tous les sens les esprits du bon peuple. Les gens étaient très curieux de connaître le dénouement de cette macabre affaire et d'en connaître tous les dessous.
On désigna le juge I.Stanislas Dufaux, célèbre pour sa droiture, son dégoût de la fausseté et surtout pour sa réputation d'incorruptible. D'ailleurs il était le digne fils de feu Yvon Brulé Dufaux, pompier de son métier, un homme d'honneur s'il en est un, qui était mort honorablement dans une explosion en faisant griller des hot-dogs sur le barbecue familial par un beau dimanche après-midi de juillet, sa bobonne de gaz ayant fui malencontreusement.
À l'arrivée du juge dans la salle d'audience, le greffier hurla comme un perdu; LEVEZ-VOUS. Saisi de stupeur, Sherlock éteignit sa pipe et Watson se donna un dernier coup de peigne, puis referma discrètement son petit miroir Gucci, cadeau de sa chère Claudia. Le temps était venu de performer devant la galerie. Il jeta un regard de chien battu autour de la salle et ajusta sa bavette en frou-frou espérant ne pas avoir l'air trop fou, affublé de ce déguisement. Soucieux de suivre le protocole à la lettre, il avait enfilé docilement l'habit traditionnel des gens de la cour malgré le fait qu'il se sentait ridicule avec sa longue perruque blanche à boudins. Il prit son courage à deux mains et son dossier de l'autre puis s'adressa au juge en chuchotant.
Watson: Votre grandeur, me permettez-vous de m'approcher de la barre?
Le juge: Bien sûr, approchez!
Watson: Vous ne trouvez pas que ça sent mauvais, cette histoire?
Le juge: J'avoue qu'il plane ici une odeur nauséabonde, mais je croyais que ça venait de vous.
Watson: Votre éminente pitance, je voudrais tout de même vous faire remarquer que j'ai pris mon bain dès ce matin, m'aspergeant de Brute fragrance et je prends ici à témoin mon collègue Sherlock qui peut vous confirmer la chose.
Le juge: Maître Watson, la perruque que vous portez date du temps de l'inquisition, si je ne me trompe?
Watson: Euh, non votre sainte instance, je l'ai louée chez Norman Lester Wysiwyg Design.
Le juge: Wysiwyg? Est-ce un dialecte amérindien, dites-moi?
Watson: Non, votre grandiloquence, il s'agit d'un anagramme fortement utilisé par les webmestres sur le web, emprunté par Norman pour sa compagnie de moumoutes. Cela signifie "What You See Is What You Get". Autrement dit, ce que vous voyez c'est ce que vous avez. Donc j'ai eu ce que j'ai vu et voyez vous-même le résultat.
Le juge: Ouin... mais enfin, il aurait pu traiter ses perruques à l'ozone pour éliminer les odeurs indésirables.
Watson: Désirant plaire à la cour, je vais de ce pas demander à mon collègue Sherlock de me poudrer la perruque avec sa petite poudre blanche qu'il traîne toujours dans son attaché-case.
Sur ce, Watson s'approcha de Sherlock qui sortit de sa serviette une boite de poudre baby's own et lui aspergea abondamment la tignasse devant la foule ahurie.
Watson: Assez, Sherlock! Vous êtes en train de m'embrouiller la vue et l'esprit.
Le juge: Trêve de futilités superficielles et frivoles, messieurs, nous ne sommes pas ici pour faire une parade de mode. Si on passait maintenant aux faits.
Watson: Compris votre pétante pestilence.
Le juge: En passant, je vous prierais de m'appeler Votre Honneur, selon la coutume.
Watson: Je ne comprends pas, pourquoi m'appelez-vous votre honneur? Et pourquoi voulez-vous que je vous appelle? Je ne suis pas là pour me faire un cercle d'amis. Quelle espèce de juge êtes-vous donc, essayez-vous de m'acheter? Je ne mange pas de ce pain-là, moi, monsieur.
Le juge: Non, je vous dis que VOUS pouvez m'appeler Votre Honneur.
Watson: Vous voulez dire que vous voulez que je vous appelle mon honneur mais dans quel but? Voulez-vous dire que je dois appeler mon honneur pour vous à la barre? Je ne comprends plus rien à votre charabia.
Le juge comprit que sa patience serait mise à rude épreuve avec cet original. À bout d'arguments, il se tourna vers le greffier pour établir une dernière formalité avant de débouter le procès proprement dit.
(Note de l'éditeur: Y'a pas une erreur là? Vous avez écrit débouter le procès au lieu de débuter.)
(Note de l'auteur: Vous saurez mon cher que débouter est un terme juridique.)
(Note de l'éditeur: Je veux bien, mais si le juge commence déjà à débouter dès le début, il n'y aura pas de procès.)
(Note de l'auteur: Bon, ça va, disons débuter alors.)
(Note de l'éditeur: Je sens que je vais devoir intervenir souvent dans ce chapitre.)
Le juge: Vous êtes Justin Trouduc, vous, le greffier?
Justin Trouduc: C'est exact, Votre Honneur.
Watson: Juste un trou du'c...?
Le juge: Alors, cessez de prendre des notes, cette partie du procès ne doit pas figurer aux minutes. Bref, le greffe ne doit pas être submergé de ces apartés inutiles, alors, allez-y en vous servant de votre jugeote, si vous en avez une.
Watson: Bon, avez-vous fini, là, de vous organiser des party avec le Trouduc. Je ne sais s'il a besoin d'une greffe capillaire ou mammaire, mais je ne vois aucun chirurgien dans la salle.
Le juge: Vous, maître Watson, fermez-là! Et, vous, le Trouduc, redescendez de votre piédestal. Le fait que votre père fût premier ministre ne signifie pas nécessairement que vous soyez une sommité. Puisque vous avez été désigné comme greffier, alors, assoyez-vous dans votre trône et fermez-là. Encore une preuve que l'intelligence saute souvent une génération.
Justin Trouduc: 10-4!
Le juge: Maintenant, maître Watson, avez-vous un témoin attraire?
Watson: Euh... à traire... euh... il y a bien la femme de la victime qui attend pour témoigner, mais est-ce qu'elle serait prête à se faire traire? euh... j'en sais foutrement rien.
Le juge: Oh pardonnez-moi, je voulais dire à attraire, qui signifie traîner devant la justice, enfin, débutons maintenant, je vous prie.
Watson: Votre majesté, je voudrais maintenant interroger mon premier témoin, il s'agit du médecin-légiste qui a examiné la victime après son décès. J'appelle à la barre, le docteur Uretère Jambon.
Le premier témoin s'approcha. De bonne corpulence, il prit place, tant bien que mal, dans la chaise des témoins où il se trouva un peu à l'étroit.
Le juge: Mettez votre main droite sur la bible et dites je le jure.
Uretère Jambon: Je ne peux pas, Votre Honneur, j'ai perdu mon bras droit dans un accident de chasse.
Le juge: Pardon, je n'avais pas remarqué cette absence. J'ai un mal de tête lancinant et pénible qui me déconcentre. C'est comme si j'avais une tuque de douleur. Alors poursuivons et prenez la gauche.
Uretère Jambon: De toute façon, j'ai dû passer l'arme à gauche depuis ce drame, si je peux m'exprimer ainsi. Voulez-vous des Anacines?
Le juge: Non non, poursuivez maître Watson.
Watson: Tout d'abord, docteur Jambon, veuillez dire à la cour quel est le jour de votre anniversaire ?
Uretère Jambon: Le 2 septembre.
Watson: Quelle année?
Uretère Jambon: Chaque année.
Watson: Docteur, combien d'autopsies avez-vous effectuées sur des morts ?
Uretère Jambon: Toutes mes autopsies ont été effectuées sur des morts.
Watson: Et dans quelles circonstances avez-vous décidé de devenir autopsien? Est-ce comme cela qu'on vous appelle?
Uretère Jambon: Pas nécessairement, plusieurs m'appellent le gros Jambon.
L'audience éclata de rire et Watson attendit le silence absolu pour poursuivre son interrogatoire.
Watson: Docteur, dites à la Cour ce que vous avez remarqué de spécial lors de l'autopsie.
Uretère Jambon: J'ai remarqué une anomalie au niveau de la glande pinéale, c'est-à-dire celle qui se situe juste au-dessous de la glande peux-tu t'taire, siège du cerveau reptilien.
Watson: Vous voulez dire la glande pituitaire, je suppose?
Uretère Jambon: C'est bien ce que j'ai dit, la glande peux-tu t'taire.
Watson: Ce détail ne me semble pas pertinent étant donné la rigidité cadavérique de la victime car, si je ne me trompe, pourrions-nous dire cher Jambon, que le moribond était d'une morbidité avancée lorsque vous décidâtes de procéder à l'autopsie?
L'avocat de la couronne: Objection votre honneur, il essaie d'influencer le témoin en mettant ses verbes au passé simple.
Le juge: Maître Watson, veuillez formuler votre question différemment.
Watson: Mais de quelle façon pourrais-je donc le faire? Moi qui m'exprime d'un français impeccable.
Le juge: À vous d'en juger.
Watson: Je vous ferai remarquer subtilement que c'est vous le juge.
Le juge: N'essayez pas de faire le drôle ou je fais évacuer la cour.
Watson: Évacuez mon ami! Évacuez, je m'en contre-torche.
L'avocat de la couronne: Objection! On doit dire je fais évacuer la salle et non je fais évacuer la cour.
Watson: Votre grande flatulence, je n'ai rien contre les objections mais vous trouvez pas que ça commence à faire, là, les objections. Y aurait-il un moyen de lui fermer la trappe juste deux minutes pour que je finisse mon interrogatoire car, à force de changer les questions, je ne m'y retrouve plus. Après tout, c'est à moi qu'appartient le fardeau de la preuve et je dois vous avouer bien humblement que ce fardeau m'a donné des hémorroïdes une bonne partie de la nuit.
Le juge: Préparation H!
Watson: Qu'est-ce que c'est que cette affaire de préparation H? Encore une formule à remplir? Vous ne trouvez pas qu'il y a assez de paperasse ici?
L'avocat de la couronne: Je ne vois pas le rapport avec notre affaire, Votre Honneur.
Watson: Votre affaire! votre affaire! Vous pouvez vous la mettre où je pense, votre affaire, espèce de tantouse.
À l'aide de son maillet, le juge frappa violemment sur son bureau afin de rétablir un peu de discipline, mais ce geste n'améliora pas son mal de tête lancinant et pénible.
Sherlock se pencha à l'oreille de Watson, inquiet de la tournure des événements.
Sherlock: Voyons! Watson, calmez-vous un peu. Vous disjonctez ou quoi?
Watson: Je ne sais pas ce qui m'a pris, c'est la nervosité, je crois. Cette pédale m'a fait perdre les miennes.
Sherlock: Cessez d'insulter la magistrature sinon vous allez vous retrouver avec un outrage à la cour et vous serez rayé du barreau ou pire encore, emprisonné derrière ceux-ci, si vous voyez ce que je veux dire.
Watson acquiesça puis il prit une grande respiration par le nez, histoire de se calmer, et poursuivit, décidé à reprendre la maîtrise de la situation.
Watson: J'appelle maintenant à la barre la sémillante Ball DeBeling, épouse de la victime, maintenant veuve de la victime.
Madame DeBeling, toute de noir vêtue était une très jolie femme aux longs cheveux noirs et elle avait de superbes yeux en amandes noirs.
(Note de l'éditeur: Des amandes noires ça n'existe pas voyons).
(Note de l'auteur: Ce ne sont pas les amandes qui sont noires, ce sont ses yeux, idiot).
(Note de l'éditeur: Vous ne trouvez pas que ça fait beaucoup de noir pour une description? Vêtue de noir, aux cheveux noirs, aux yeux noirs, c'est répétitif.)
(Note de l'auteur: Il ne faut pas oublier que cette femme est en deuil, le noir convient très bien.)
Note de l'éditeur: Bon, ça va, je fais le compromis mais promettez-moi de ne plus faire le con. Promis?)
Sa démarche de mannequin suscita l'admiration de la foule ainsi que celle du juge mais elle était tout à fait inconsciente de l'effet qu'elle provoquait sur son passage. Simple et gracieuse, elle s'avança timidement et prit place à la barre des témoins.
Le juge: Mettez votre main droite euh.. la main gauche plutôt... euh enfin euh... celle qui vous convient le mieux, sur la bible et dites je suis toute à vous juge... euh dites je le jure.
Ball DeBeling: Je le jule.
Le juge: Pourriez-vous répéter?
Ball DeBeling: Je le jule votle honneul.
(Note de l'éditeur: Ah non! Vous n'allez pas recommencer à changer les r pour des l? Ça devient redondant à la fin.)
(Note de l'auteur: Bon, okay, c'est compris. Je voulais simplement décrire l'ambiance le plus fidèlement possible en respectant les accents régionaux.)
Le juge: Bon, procédons, c'est l'intention qui compte après tout, nous prenons en considération votre accent régional.
Watson: Madame DeBeling, corrigez-moi si je me trompe mais c'est bien vous qui avez découvert, tout à fait par hasard, le corps ensanglanté de votre mari immédiatement après le drame?
Ball DeBeling: Oui, je l'ai trouvé bien mort dans la position du foëtus, près du fourneau.
Watson: Dirions-nous que vous avez été extrêmement surprise de le trouver dans cette position car, pour que vous sussiez qu'il était déjà mort, il eut fallu que vous eussiez déjà été au courant de quelque chose de louche?
Ball DeBeling: Euh... c'était quoi la question?
Watson: Je précise; avant que vous le vîtes ainsi aviez-vous des soupçons que quelqu'un eusse pu en vouloir à sa vie?
Ball DeBeling: Euh... oui...euh...non.
Objection!
C'était encore l'avocat de la couronne qui n'avait que ce mot à la bouche. Cette redondance exaspéra Watson qui explosa.
Watson: Votre Honneur, ce clown m'empêche de faire mon travail, pourriez-vous lui dire de se la fermer une bonne fois pour toute?
Le juge: Nous devons suivre la procédure, maître Watson.
Watson: Bon, où en étais-je? Madame DeBeling, je vois ici, dans le contrat signé de votre main, que c'est vous qui fabriquiez les fortune-cookies pour le restaurant chinois de votre mari, en d'autres mots, la victime, votre ex dont vous êtes la veuve de.
Ball DeBeling: Oui c'est bien cela. Je suis la cuisinière en chef et j'ai la charge de cuisiner les fortunes-cookies ainsi que le moo goo guy pen, le moo goo guy kew et le moo goo guy chicken ball red sauce...
Watson: Bon ça va, on comprend l'idée. L'accusé ici présent vous aurait-il approchée en douce pour obtenir une recette en particulier?
Ball DeBeling: Disons qu'il aimait bien m'assister dans ma tâche quand j'enroulais mes fortune-cookies, tout en jasant de choses et d'autres. Il me complimentait souvent sur mes yeux en amandes.
Watson: Lui avez-vous livré le secret de votre recette, en fin de compte?
Ball DeBeling: Notre restaurant ne fait pas la livraison.
Watson: Dois-je comprendre qu'il a dû essuyer un refus de votre part?
Ball DeBeling: C'est moi qui essuyait le comptoir, lui il ne faisait que regarder.
Watson: Pourrait-on dire qu'il n'agissait qu'en tant que voyeur culinaire?
Ball DeBeling: Oui, et je lui ai dit de parler avec mon mari pour les détails. D'ailleurs, ils s'étaient donné rendez-vous le jour du crime, mais Hervé ne s'est jamais présenté.
Watson: Je remarque que vous appelez l'accusé par son prénom, étiez-vous très intimes ou me trompe-je?
Ball DeBeling: On se voyait à tous les jours depuis un mois. Il tenait à me voir à l'oeuvre quand je me tortillais euh pardon quand je tortillais mes fortune-cookies pour y faire pénétrer les petits messages sur papier. Et il n'arrêtait pas de dire que j'avais de beaux yeux en amandes.
Watson: Oui oui, nous savons tout cela, poursuivez.
Ball DeBeling: Dès que les biscuits étaient prêts, il tenait à vérifier s'ils ne contenaient pas de gras trans. Il en cassait quelques-uns et lisait les petits messages à voix basse avec un air soucieux.
Watson: Mais dites-nous, qui préparait ces petits messages destinés à entrer dans la fabrication des fortune-cookies?
Ball DeBeling: Un ami de mon fils, Swing Lä.
Watson: Votre fils Swing Lä Beling? Celui-là même que vous avez conçu avec Chuck Dê Beling, votre mari ou, si on préfère, la victime dont vous êtes la veuve, c'est à dire le père de Swing?
Ball DeBeling: Oui, c'est bien ça. Mon fils Swing Lä se chargeait d'aller cueillir les messages chez son ami et les apportait au magasin pour que je les enfile dans les biscuits.
Watson: Merci, madame DeBeling. J'en ai fini avec ce témoin. Avocat de la couronne, le témoin est à vous.
L'avocat de la couronne: Madame DeBeling, est-ce que vous étiez...
Watson: Objection Votre Honneur!
L'avocat de la couronne: Pourquoi cette objection? Je n'ai même pas encore posé ma question.
Watson: Ben quoi? J'ai pas le droit de me pratiquer moi aussi?
Le juge: Objection rejetée, poursuivez maître .......
L'avocat de la couronne: Madame Debeling, est-ce que vous étiez très intime avec l'accusé ici présent?
Watson: Objection Votre Honneur!
L'avocat de la couronne: Qu'est-ce qu'il y a encore?
Watson: C'est énervant hein? Vous me comprenez maintenant?
Le juge: Maître Watson, taisez-vous! Madame DeBeling, poursuivez!
Ball DeBeling: Aussi intime que mon mari l'était avec lui.
L'avocat de la couronne: Bon, votre honneur, j'en ai terminé avec ce témoin.
Perdu dans ses pensées, le juge manipula son maillet d'une drôle de façon en regardant madame DeBeling s'éloigner gracieusement.
Watson: Monsieur le juge!
Le juge restait silencieux, lunatique, rêveur.
Watson: Monsieur le juge! Êtes-vous toujours avec nous? J'ai rapporté du lieu du crime, un sac de fortune-cookies et j'aimerais le déposer comme pièce à conviction numéro 69.
Le juge: Veuillez le remettre au Trouduc.
Watson retourne à son bureau et cherche le sac en question à travers la paperasse.
Watson: Qu'est-ce que vous faites Sherlock? Vous avez la bouche pleine, êtes-vous en train de manger le sac de fortune-cookies? Ce sont les pièces à convictions pardi!
Sherlock: Euh... j'avais un p'tit creux et j'en ai mangé une dizaine, c'est tout.
Watson: Mais les petits papiers, où avez-vous mis les petits papiers?
Sherlock: Quels papiers?
Swing Lä Beling dans l'fond du tribunal regardait le déroulement du procès d'un œil perplexe. Etant le fils de la victime, il se doutait que le procès ne serait pas une mince affaire, son père n'ayant aucun ennemi connu. Il se sentait un peu coupable d'avoir introduit Gaétan Tanguay, le gourou de l'Ordre Vert dans le commerce familial. Mais il chassa ces pensées de son esprit, tout ça remontait à une dizaine d'années et il n'avait rien pu faire pour se débarrasser de la secte de supra intellectualistes qui avait des tentacules dans tous les milieux.
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